Un nouveau scandale financier éclate au cœur de l’industrie congolaise, menaçant de torpiller la relance tant attendue de la Société Textile de Kisangani (SOTEXKI). Alors que des millions de dollars devaient redonner vie à ce fleuron économique, nos enquêtes révèlent un vaste détournement de fonds, pointant du doigt le clan de l’ancien président Joseph Kabila et des ministres actuels de l’Industrie Louis Watum Kabamba, du Portefeuille Jean Lucien Bussa, du commerce extérieur Julien Paluku et l’ancien ministre des Finances Nicolas Kazadi. Les 8 millions de dollars décaissés pour une première phase se sont volatilisés, et le gouvernement s’apprête pourtant à injecter 7 millions de plus.
La SOTEXKI, un gâchis national ?
Depuis son inauguration en 1974 par le Maréchal Mobutu, la SOTEXKI était un symbole d’espoir pour la Tshopo, créant des emplois et dynamisant l’économie locale. Mais après des décennies de gestion chaotique et de reventes successives, la société s’est effondrée. Aujourd’hui, l’actionnaire majoritaire est la société TEXICO (61%), aux côtés de l’État congolais (39%).
L’arrivée du Président Félix Tshisekedi avait pourtant ravivé la flamme. En septembre 2022, un ambitieux plan de relance de 17,5 millions de dollars était approuvé, avec déjà plus de 8,7 millions de dollars décaissés par la Banque Centrale du Congo. Cet argent était censé marquer un nouveau départ, avec l’État congolais devenant pour la première fois l’actionnaire majoritaire, lui donnant le droit de nommer un nouveau Directeur Général pour piloter la relance.
L’argent s’envole, les machines sont des poubelles
Mais sur le terrain, la réalité est amère. Non seulement les fonds décaissés n’ont pas produit les effets escomptés, mais de graves anomalies ont été mises en lumière :
• L’État aux abonnés absents : malgré sa position d’actionnaire majoritaire, l’État congolais n’a aucun représentant au sein de la direction de la SOTEXKI. Pire, le Directeur Général actuel, LOKO Glombert, aurait été nommé pour le compte de TEXICO, une société liée à madame Fortuna, de nationalité italienne, présenté comme le « responsable des sociétés écrans du président honoraire Joseph Kabila ». Cette absence de contrôle étatique est une porte ouverte à tous les abus.
• Des marchés publics bidon : les procédures de passation de marchés sont bafouées. Les achats de machines et d’équipements se font de gré à gré, violant toutes les règles de transparence. Et la supercherie va plus loin : il a été découvert que TEXICO a vendu à la SOTEXKI des machines importées en 2015 pour un projet avorté à Kinshasa. Des équipements déjà obsolètes et en mauvais état qui plombent d’emblée toute tentative de relance.
• Des millions utilisés « à la discrétion » : les fonds alloués sont utilisés par les actionnaires majoritaires « selon leur propre appréciation, sans contrôle ni supervision adéquate ». En clair, l’argent public sert des intérêts privés, sans que personne ne rende de comptes.
L’histoire se répète : le FPI déjà victime d’abus dans les années 90
Cette situation n’est pas sans rappeler un précédent douloureux. Dans les années 1990, la SOTEXKI avait déjà bénéficié de fonds du FPI (Fonds de Promotion de l’Industrie) pour sa modernisation. Ces fonds avaient été mal utilisés, obligeant le FPI à récupérer certains biens matériels et conduisant au morcellement progressif de la concession. L’histoire semble tragiquement se répéter, mettant en péril l’avenir de la SOTEXKI et le destin de milliers d’ouvriers.
Urgence : le peuple de la Tshopo exige la vérité et la justice
Face à ce scandale, nous appelons à une action immédiate et décisive :
– La nomination sans délai d’un représentant de l’État au sein de la direction de la SOTEXKI ;
– La désignation d’un ou deux commissaires aux comptes indépendants pour auditer l’utilisation des fonds ; Et,
– Le respect strict des procédures de passation de marchés publics.
Il est crucial qu’une mission de vérification approfondie soit lancée, impliquant la Primature, les ministères de l’Industrie, du Portefeuille et des Finances, ainsi que l’Inspection Générale des Finances (IGF). L’objectif : faire toute la lumière sur les parts de l’État, l’achat des machines et l’utilisation réelle des fonds.
La SOTEXKI ne peut pas se permettre un nouvel échec. Le gouvernement doit agir maintenant pour mettre fin à cette gabegie et garantir que les fonds publics servent réellement à la relance de cette entreprise stratégique pour la RDC.